II/ Les fondements de la jurisprudence islamique (usûl al-fiqh) (partie 8)

mardi 24 avril 2007

7. Al-Ijtihâd

a) Définition et classification

Nous avons déjà expliqué que les deux principales sources du droit et de la jurisprudence islamiques sont le Coran et la Sunna et que le Prophète (PBDL ), lorsqu’il envoya Mu‘âdh au Yémen, approuva son intention de « mettre toute [son] énergie à formuler [son] propre jugement » au cas où il ne trouverait pas d’indication dans les textes du Coran et de la Sunna. Cet effort personnel entrepris par le juriste afin de comprendre la source, d’extraire les règles ou, en l’absence d’indication textuelle claire, de formuler des jugements indépendants, est ce qu’on appelle ijtihâd dans le domaine de la jurisprudence islamique. Voici la définition proposée par Hashim Kamali :

« L’ijtihâd est défini comme la totalité de l’effort effectué par un juriste afin de déduire, avec un degré de probabilité, les règles de la sharî‘a à partir des indications détaillées dans les sources. Certains oulémas ont défini l’ijtihâd comme l’utilisation par un juriste de toutes ses facultés soit à déduire les règles de la sharî‘a de leurs sources, soit à mettre ces règles en pratique et à les appliquer à des questions précises. L’ijtihâd consiste essentiellement en une déduction (istinbât) qui représente une probabilité (zann), et ne concerne donc pas l’extraction d’une règle d’un texte explicite. » [1]

Comme al-maslaha, l’instrument juridique d’al-ijtihâd a été utilisé pour justifier toutes sortes de nouveaux jugements. Ainsi Hashim Kamali rappelle-t-il fort justement le principe général (sur lequel les oulémas s’accordent unanimement) selon lequel il n’y a pas d’ijtihâd là où il existe un texte explicite dans les sources (lâ ijtihâda ma‘a n-nas). Cela signifie que s’il existe un verset coranique explicite, dont le sens est évident et ne peut donner lieu à aucune hypothèse ni interprétation (qat‘î ad-dalâla), aucun ijtihâd n’est possible. De même, si le juriste trouve un hadîth authentifié (mutawâtir, qat‘î ath-thubût [2]) dont le contenu est également tout à fait explicite et sans ambiguïté (qat‘î ad-dalâla), il doit s’y référer et il n’y a pas lieu de pratiquer l’ijtihâd.

En fait, ces textes clairs, à la fois authentifiés et explicites, représentent, même s’ils ne sont pas très nombreux, les fondations immuables, les principes fixes sur lesquels s’appuie la sharî‘a ; des principes auxquels le juriste doit se référer et à partir desquels il est à même d’analyser, de commenter et d’expliquer les textes contenant une part de conjecture (zannî), et sur la base desquels il devrait aussi formuler, dans un processus dynamique, de nouveaux jugements lorsque sa communauté est confrontée à de nouvelles situations. Les lois ou prescriptions fournies par ces textes clairs constituent ensemble un cadre spécifique que les ‘ulamâ’ al-usûl appellent al-ma‘lûm min ad-dîn bid-darûra, ce qui signifie qu’elles relèvent de l’essence fondamentale du droit islamique et que leur rejet conduit à la négation de l’islam (kufr).

Néanmoins, la grande majorité des versets du Coran et des traditions du Prophète (PBDL ) n’est pas de cette nature à la fois stricte et très contraignante. Le Coran est authentifié en soi (qat‘î ath-thubût, d’origine indiscutable) mais la majeure partie des versets comprenant des prescriptions juridiques (ayât al-ahkâm) est susceptible d’analyse, de commentaire et d’interprétation (zannî ad-dalâla), comme c’est le cas également pour les ahâdîth qui, en majorité, laisse une latitude à la conjecture tant au niveau de leur authenticité (thubût) que de leur signification (dalâla). Cela signifie que les fuqahâ’ (juristes) ont eu, et ont encore, une fonction importante et impérative dans la formulation des lois qualifiées d’islamiques. Et ce, en particulier grâce à leur ijtihâd appliqué à différents niveaux : pour ce qui concerne la compréhension d’un texte spécifique (à la lumière de l’ensemble du cadre juridique islamique) ; la classification des textes effectuée en fonction de leur clarté ou de leur nature (qat‘î, indiscutable, ou zannî, conjectural ; zâhir, manifeste, ou nas, explicite ; khâs, spécifique, ou ‘âm, général, etc.) ; ou encore la formulation de jugements là où il n’existe aucun texte. L’ijtihâd dans son ensemble (à la fois comme source et comme instrument juridique) a en fait été considéré par de nombreux oulémas comme la troisième source principale de la sharî‘a, recouvrant al-ijmâ‘ (ijtihâd jamâ‘î), al-qiyâs (ijtihâd fardî), al-istislâh, al-istihsân ainsi que les autres subdivisions connues parmi ce qu’on appelle les sources supplémentaires de la sharî‘a. Comme le souligne Mohammad Hashim Kamali :

« Les diverses sources du droit musulman, aux côtés du Coran et de la Sunna, sont toutes des manifestations d’al-ijtihâd, bien qu’elles possèdent des différences relevant essentiellement de questions de procédure. Ainsi, le consensus d’opinion, l’analogie, la préférence juridique, les considérations d’intérêt général (maslaha) sont étroitement liés non seulement sous le titre général d’ijtihâd, mais aussi à travers le Coran et la Sunna. » [3]

Al-Ghazâlî, ash-Shâtibî, Ibn al-Qayyim al-Jawziyya et plus récemment al-Khallâf et Abû Zahra ont mentionné ce type de classification en soulignant l’importance de l’ijtihâd comme troisième source de la jurisprudence islamique, car l’ijtihâd comprend tous les instruments employés pour former des jugements par le raisonnement humain et l’effort personnel. L’ijtihâd est, en fait, une élaboration rationnelle de lois soit fondées sur les sources, soit stipulées à leur lumière. Ainsi, même al-ijmâ‘ (le consensus) est le produit d’une élaboration collective humaine et rationnelle, et l’on peut donc envisager – quoique ce soit peu probable ou très rare – qu’une décision juridique prise par ijmâ‘ finisse par paraître inappropriée et doive être remise en cause. Comme le dit le Pr Muhammad Hamidullah, à propos de l’école juridique hanafite :

« L’opinion d’un juriste peut toutefois être rejetée par un autre juriste qui peut proposer sa propre opinion à la place. Cela s’applique non seulement à l’opinion ou à la déduction individuelles, mais aussi à l’opinion collective. Au moins l’école juridique hanafite admet qu’un nouveau consensus peut annuler un ancien consensus. Supposons qu’un consensus existe sur une question. Nous acceptons son autorité, mais cela ne signifie pas que personne n’aura jamais le droit de s’y opposer. Si quelqu’un a le courage de s’y opposer avec le respect et les bonnes raisons nécessaires, et s’il peut persuader les juristes d’accepter son point de vue, un nouveau consensus se forme. Ce nouveau consensus abroge alors l’ancien. Ce principe a été exprimé par le célèbre juriste hanafite, Abû al-Yusr al-Bazdâwî dans son ouvrage Usûl al-fiqh (Les Principes de la jurisprudence). Al-Bazdâwî a vécu aux IVe et Ve siècles de l’Hégire, et cet ouvrage est une grande contribution à la jurisprudence islamique. C’est sur la base de son affirmation que nous pouvons dire que le consensus ne peut pas devenir pour nous une source de difficulté. Si un consensus est atteint sur une question, et qu’on s’aperçoit par la suite qu’il est inapproprié, la possibilité demeure de le changer par le raisonnement, et d’aboutir à un nouveau consensus annulant par là même l’ancien. » [4]

Cette analyse rappelle un principe important du domaine d’usûl al-fiqh. Ce principe est que le Coran et la Sunna sont les deux seules sources indiscutables, des sources au sein desquelles les versets et les ahâdîth prescriptifs (ayât wa-ahâdîth al-ahkâm) [5] sont divisés en deux principaux niveaux : le qat‘î (indiscutable) qui est clair en soi ; et le zannî (conjectural, susceptible d’hypothèses et d’interprétations) qui nécessite de la part des oulémas une étude attentive des textes en question pour qu’ils puissent déduire les jugements appropriés devant être extraits des sources. Le but de ce type d’ijtihâd (en présence de textes zannî) – parfois dénommé bayânî (ijtihâd explicatif) – est d’analyser le texte (nas) afin d’en extraire une prescription et sa ‘illa (la raison d’être effective de cette prescription spécifique) ; ce qui permettra alors à la fois une compréhension adéquate du texte et un éventuel raisonnement analogique (qiyâs) à la lumière du contexte historique. Ce type d’ijtihâd a donné lieu à de nombreuses et diverses subdivisions suivant les différents avis des oulémas.

Il existe une autre sorte d’ijtihâd lorsqu’il n’y a pas de référence scripturaire. Ici aussi, nous trouverons de nombreuses subdivisions en raison de la diversité existant parmi les oulémas et les compilations d’ouvrages et de commentaires réalisées au cours de l’Histoire. Au moins trois types se dégagent :
– l’ijtihâd qiyâsî procède par raisonnement analogique prenant en considération la raison d’être effective (‘illa) d’une prescription extraite des sources ;
– l’ijtihâd zannî prévaut dans le cas où il est impossible de se référer à une raison d’être effective connue ; ce dernier type est souvent lié à l’ijtihâd islâhî ;
– l’ijtihâd islâhî est fondé sur al-maslaha, et cherche à déduire les prescriptions à la lumière de l’objectif général de la sharî‘a.
Il n’existe cependant pas d’unanimité parmi les oulémas quant à une classification spécifique dans le domaine d’al-ijtihâd, car ils ne se sont pas même accordés sur sa définition et ses moyens d’application.
Une autre distinction porte sur le degré de l’ijtihâd, qui peut être absolu (mutlaq) ou limité (muqayyad). Le premier type, également appelé ijtihâd fi ash-shar‘, se fonde sur la capacité du mujtahid (savant qualifié pour pratiquer l’ijtihâd) d’extraire et de formuler des jugements par lui-même sur la base d’une étude directe des sources. Le second, appelé ijtihâd limité ou ijtihâd madhhabî (d’école), se limite au contraire à une école précise et le mujtahid doit alors formuler des jugements en accord avec les règles d’une école juridique donné [6].

b) Les conditions (shurût) de l’ijtihâd

Le cadre que nous venons de présenter dans la section précédente, avec la définition et la classification de l’ijtihâd, a été pris en compte par les oulémas quand il s’est agi de déterminer les conditions de l’ijtihâd. Pour analyser et classer ces dernières, ils ont fixé leur attention sur les qualités qu’un savant doit posséder pour exercer un ijtihâd authentique et fiable, pour devenir un mujtahid. Comme pour les autres classifications, de nombreuses conditions divergentes ont été formulées par les oulémas en raison de leurs opinions respectives quant aux instruments juridiques, à l’applicabilité des lois ou, simplement, aux priorités de leur mise en œuvre.

Avant d’aller plus loin dans la présentation des conditions nécessaires pour être un mujtahid, il paraît utile de nous référer ici à l’opinion concise d’ash-Shâtibî qui fait la différence entre la nature même de l’ijtihâd et ses instruments. Sa vue d’ensemble, en ce sens, est simple et clarificatrice, car il ramène toutes les conditions sous deux rubriques principales. Ainsi, selon lui, « le degré de l’ijtihâd est atteint lorsque deux qualités sont présentes :

  1. Une compréhension profonde des objectifs (maqâsid) de la sharî‘a.
  2. Une maîtrise réelle des différentes méthodes de déduction et d’extraction (istinbât) fondée sur la connaissance et la compréhension. » [7]

Les « cinq principes essentiels » (ad-darûriyyât al-khamsa) que nous avons déjà mentionnés (la religion, la vie, la raison, la descendance et la propriété) ainsi que la distinction nécessaire qui existe entre l’indispensable (darûrî), le nécessaire ou complémentaire (hâjî) et les embellissements ou améliorations (tahsînî) constituent le cadre donné par le législateur pour orienter les recherches du mujtahid, et représentent donc la référence fondamentale. Le mujtahid doit aussi savoir quels sont les instruments [8] auxquels il peut avoir recours parmi les maximes générales d’al-fiqh, d’al-qiyâs, d’al-istihsân et ainsi de suite.
D’Abû al-Husayn al-Basrî et son ouvrage Mu‘tamad fî usûl al-fiqh (XIe siècle) à Ibn al-Qayyim al-Jawziyya avec son I‘lâm al-muwaqqi‘în ‘an rabb al-‘âlamîn (XIVe siècle), de nombreux oulémas ont proposé différentes classifications des qualités requises et des conditions permettant à un savant d’être considéré comme mujtahid. Certains considéraient que la première condition était la connaissance de la langue arabe [9] ; d’autres pensaient que ce qui comptait avant tout était la connaissance des versets et ahâdîth de portée juridique. Malgré ces divergences, qui sont en réalité essentiellement procédurales puisque leurs conditions respectives se recoupent les unes les autres, nous pouvons synthétiser les travaux des oulémas dans ce domaine en mentionnant les sept points suivants.

Le mujtahid doit atteindre :

  1. Une connaissance de la langue arabe lui permettant de comprendre correctement le Coran et la Sunna et, en particulier, les versets et ahâdîth contenant des prescriptions (ayât wa-ahâdîth al-ahkâm).
  2. Une connaissance des sciences du Coran et du hadîth lui permettant de comprendre et d’identifier les preuves contenues dans les textes (adilla) et, qui plus est, de déduire et d’extraire les prescriptions.
  3. Une connaissance profonde des objectifs (maqâsid) de la sharî‘a, de leur classification et des priorités qu’ils impliquent.
  4. La connaissance des questions faisant l’objet d’un consensus : cela nécessite de connaître la substance des travaux sur les questions secondaires (furû‘).
  5. La connaissance du principe du raisonnement analogique (qiyâs) et de sa méthodologie (les raisons d’être, ‘ilal, ou les circonstances, asbâb, d’une prescription spécifique, les conditions, shurût, etc.).
  6. La connaissance de son contexte historique, social et politique ; c’est-à-dire, la situation des gens qui vivent autour de lui (ahwâl an-nâs), leurs conditions de vie, leurs traditions, leurs coutumes, etc.
  7. La reconnaissance de sa compétence, de son honnêteté, de sa fiabilité et de sa droiture [10].

Comme nous l’avons déjà mentionné, de nombreuses autres conditions, dans des ordres différents, ont été proposées, mais ces sept points rassemblent, plus ou moins, les qualités les plus importantes requises pour être un mujtahid [11].

Certains oulémas considèrent que ces conditions et ces qualifications sont si élevées et si exigeantes qu’il n’a plus été possible d’atteindre ce niveau après l’époque des grands oulémas, vers le IXe siècle. C’est ainsi qu’ils expliquent la fermeture définitive des « portes de l’ijtihâd » après cette époque florissante. D’autres oulémas, la grande majorité, sont d’avis que la pratique de l’ijtihâd a été en partie abandonnée en raison de circonstances historiques qui ont poussé soit les dirigeants politiques soit les oulémas à déclarer qu’il n’était désormais plus nécessaire de pratiquer l’ijtihâd . Par conséquent, les portes de l’ijtihâd n’ont jamais été fermées, car aucun savant n’aurait eu le droit de prendre une telle décision au nom de l’islam puisqu’une telle affirmation est, par sa nature même, contraire à celui-ci : en effet, l’ijtihâd, en tant que troisième source du droit et de la jurisprudence islamiques, est fard kifâya, une obligation collective. Tous reconnaissent que ces conditions sont exigeantes et qu’elles sont toujours requises pour permettre un ijtihâd qualifié, mais ils affirment que ces qualifications n’ont jamais été hors de la portée des oulémas au cours des époques tardives et jusqu’à l’époque contemporaine. Les progrès enregistrés dans le domaine de l’authentification des ahâdîth, l’accès plus facile aux ouvrages de référence et la classification informatisée facilitent le travail du mujtahid et le rendent plus efficace. Par conséquent la communauté musulmane, à travers ses oulémas, doit encore s’acquitter aujourd’hui de ce devoir fondamental, bien qu’il lui faille trouver la manière adéquate de l’appliquer dans notre contexte contemporain – en raison de la complexité nouvelle de nombreuses sciences, comme la médecine, la technologie, l’économie, les sciences sociales, etc. . Al-ijtihâd demeure l’instrument le plus important livré aux mains des oulémas pour réaliser la vocation universelle de l’islam, grâce à une dynamique constante d’adaptation faite à la lumière de l’époque et du contexte.


[1Mohammad Hashim Kamali, Principles of Islamic Jurisprudence, op. cit., p. 366.

[2Selon la classification effectuée par les spécialistes de la critique du hadîth, al-hadîth al-mutawâtir (avéré) possède le plus haut degré d’authenticité. Une des conditions de son acceptation comme mutawâtir est d’avoir de nombreux rapporteurs à chaque niveau de sa chaîne de transmission (il existe différentes opinions quant au nombre requis. As-Suyûtî considérait qu’il en fallait « au moins dix »). Voir as-Suyûtî, Tadrîb ar-râwî fî sharh taqrîb an-Nawawî, Le Caire, Al-latîf, 1960 ; et Mahmûd at-Tahhân, Taysîr mustalah al-hadîth, Beyrouth, 1985, trad. fr. Précis des sciences du hadîth, Paris, Al Qalam, 1994. Il n’existe que quelques ahâdîth de cette nature considérés comme qat‘î ath-thubût (indiscutables sur le plan de l’origine ou de la transmission) : le contenu doit en outre être parfaitement clair pour éviter l’ijtihâd.

[3Mohammad Hashim Kamali, Principles of Islamic Jurisprudence, op. cit., p. 366.

[4Muhammad Hamidullah, The Emergence of Islam, édité et traduit par Afzal Iqbal, Islamabad, Islamic Research Institute, 1993, p. 97.

[5Il existe différentes opinions chez les oulémas quant au nombre de ces versets et ahâdîth. Par exemple, al-Ghazâlî ou Ibn al-‘Arabî ont compté cinq cents versets, tandis que ‘Abd al-Wahhâb Khallâf en a recensé environ deux cent vingt-huit. Ash-Shawkânî considérait cependant que de tels comptes ne sont pas certains et définitifs puisque certains versets peuvent être interprétés différemment suivant le savant et le contexte. On pourrait en dire autant des ahâdîth al-ahkâm, même si Ibn Hanbal est censé avoir dit qu’il y a environ mille deux cents ahâdîth de cette catégorie. Voir ash-Shawkânî, Al-qawl al-mufîd fîl-ijtihâd wat-taqlîd, Le Caire, s. e., 1975, chapitre II ; et ‘Abd al-Wahhâb Khallâf, ‘Ilm usûl al-fiqh, op. cit., trad. fr. Les Fondements du droit musulman, op. cit., p. 46-47.

[6Il existe encore bien d’autres classifications détaillées dans le domaine de l’ijtihâd, dont l’étude dépasse le cadre de notre travail. Elles sont connues des spécialistes d’usûl al-fiqh et sont l’objet de discussions et de controverses importantes parmi les oulémas. C’est le cas, par exemple, du problème de la « divisibilité de l’ijtihâd » (at-tajzi’a) sur laquelle des pages et des pages d’arguments ont été écrites. C’est une question très théorique, et en fait secondaire. Nous aborderons la question de l’ijtihâd fardî (individuel) et jamâ‘î (collectif) plus loin.

[7Ash-Shâtibî, Al-muwâfaqât fî usûl ash-sharî‘a, Liban, Dâr al-ma’rifa, nouv. éd. 1996, vol. 4, chapitre « Les conditions de l’ijtihâd », p. 477 et suiv. (tout le chapitre).

[8C’est ainsi qu’ash-Shâtibî lui-même appelle la deuxième qualité : après avoir dit que la première est l’objectif, il ajoute que « la deuxième est l’instrument ». Voir ibid., vol. 4, p. 478.

[9Ash-Shâtibî, par exemple, était très exigeant en ce domaine : il pensait que quelqu’un qui ne possédait pas une connaissance approfondie de la langue arabe ne pouvait atteindre le véritable degré d’ijtihâd. Voir ibid., vol. 4, p. 590 et suiv.

[10Cette reconnaissance doit émaner aussi bien des autres savants que de la communauté musulmane.

[11Les oulémas ont prescrit des conditions différentes pour le mujtahid mutlaq (absolu) et le mujtahid muqayyad (limité) qui se contente de déduire des prescriptions dans le cadre d’une école juridique spécifique. Les conditions requises pour ce dernier sont bien entendu moins exigeantes, et on y ajoute la connaissance des règles de déduction liées à l’école juridique en question.

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